Mardi 10 août 2021

Passe à ton voisin

On pourrait ainsi célébrer la fin de quelque Olympiade. Les courses de relais, où l’on se passe à pleines enjambées un témoin de bois, y font fureur. Ici, ce sont les écrivains qui se passent un livre, de jour en jour. A pleines enjambées.
L’expression « passage de témoin » vient des pompiers américains qui, en 1893, avaient organisé pour populariser leur corps, une course où tous les participants se relayaient chaque 300 m en se passant un drapeau rouge. Le succès fut tellement énorme que, dès les Jeux olympiques de Stockholm, dix-neuf ans plus tard, les courses de relais sur 4 x 100 mètres et 4 x 400 mètres furent programmés. Le drapeau, « témoin » du passage, fut changé pour un bâton de bois de 30 cm de longueur.
A Lagrasse, donc, la performance est d’un autre ordre. Chaque jour, à 12h30, sous les arbres de l’abbaye, un athlète de l’écriture et de la lecture vient accrocher, sur la corde tendue entre les troncs, un texte, une idée, un rapprochement de sens. (C’est une image, ne cherchez pas la corde). Mathieu Potte-Bonneville a allumé, dimanche, la belle mèche. Il fut question, bien sûr, de témoins et de baleine, et pour finir, il grava sur le tronc derrière lui (ne cherchez pas, c’est une image) une belle phrase de Melville, qui parlait « d’épousseter les vieilles grammaires ». A charge pour Marielle Macé de poursuivre hier midi.
Il fut donc question de parole. Les Guaranis pensent que faire naitre un enfant, c’est le verser dans la langue. C’est une des premières choses que Marielle Macé a partagé hier dans son passage de témoin. La langue, et la triste douceur qu’on y trouve parfois, à la découverte de sa propre précarité. « La parole est une des régions les plus polluées de la planète » dit-elle.
Elle avait commencé son intervention par cette phrase de Gilles Deleuze : « Une idée, c’est une flèche lancée en l’air par un penseur, et ramassée par d’autres. » On y a pensé un peu plus tard, bien sûr, quand Jeanne Favret-Saada et Arnaud Esquerre retissèrent, entre parole et témoin, les fils de l’éternelle question de la haine des Juifs.

18h, Jeanne et la haine

Comment peut-on, après la seconde guerre mondiale, opposer l’antisémitisme hitlérien et un antijudaïsme des Églises chrétiennes, religieux et non pas politique ? En ignorant les preuves de la permanence de la haine des Juifs dans la pensée vaticane, même Hannah Arendt et Léon Poliakov se laissèrent prendre à cette mauvaise question. À partir de l’étude d’un Mystère de la Passion, à Oberammergau en Bavière, Jeanne Favret-Saada met à jour la véritable action politique des Églises chrétiennes.

Louise Piélat, dessins volent

C’était à l’automne 2020. Après sélection du jury de la Maison du Banquet, Louise Piélat, paysagiste et fine dessinatrice, était sélectionnée pour participer à la Résidence partagée de l’année. Partagée avec deux autres créateurs, Estelle Chauvard et Adrien Genoudet.
On les entendit tous trois hier après-midi, raconter leurs aventures lagrassiennes. Une exposition en rend compte, dans l’abbaye, jusqu’en septembre prochain. On s’arrêtera juste sur l’installation de Louise, sur la galerie de la cour de l’abbé. Une longue guirlande en ribambelle, où se déploient des dizaines de dessins, aquarelles, crayons de couleurs ou mine sèche : les jardins de Lagrasse, dans leur intimité, leurs secrets, plans larges ou détails minuscules, mur de pierre ou scarabée. Des dessins, comme des papillons qui volètent. Une magnifique surprise…

Quelques destins

Des parcours de vie d’Audois, perdus dans les replis de l’histoire.

Aujourd’hui, Louis Alibaud, qui voulut tuer le Roi.

Sous Louis-Philippe, le camp républicain considérait que la personne du roi était un obstacle impardonnable. L’idée de le supprimer était des plus répandues. Même chez le sieur Alibaud, de Narbonne…
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Idriss, quelle drôle d’année !

Le moins qu’on puisse dire, c’est que cette année qui s’achève n’a ressemblé à aucune autre.
Pour en retrouver les sursauts, nous avons parcouru avec lui les archives d’Idriss Bigou-Gilles, jeune photographe de presse indépendant qui vit dans les Corbières.
En sept clichés, une drôle d’année, dont il faudra quand même se souvenir.
Photo n°4, Vigipirate à l’école (jeudi 5 novembre 2020, Collège de la Conte à Carcassonne)

Pour l’entretien avec Idriss, cliquez sur la photo

Une enfance et la guerre

Dima El Horr est une réalisatrice franco-libanaise qui vit entre Paris, Lagrasse et Beyrouth. Elle a choisi, pour cette année de parcours, de revenir sur quelques histoires de livres et de lecture qui ont marqué son adolescence, pendant la guerre civile qui déchira le Liban entre 1975 et 1990.

Parcours de lecture

Parmi les grandes lectures qui ont marqué, depuis vingt-cinq ans, les nuits profondes ou les aimables après-midi du Banquet, il y eut ce parcours. Le 8 août 2010, dans le cadre du banquet du livre intitulé « Contre la gestion politique du tous, le souci du chaque-un« , ces lectures d’Olivier Rolin…

numéro 123

Le programme du jour

10h : ouverture des librairies et du bistrot
10h30 : Grand Petit Déjeuner, avec Jeanne Favret-Saada et Arnaud Esquerre (jardins de l’abbaye)
12h30 : Passage de témoin. (jardins de l’abbaye)
16h : Triple voix : Zineb Dryef, Simon et Capucine Johannin, « écrire et raconter la jeunesse« . (chapiteau de l’abbaye)
17h45 : La Criée (librairie du Banquet)
18 h : Conférence Paulin Ismard, « Cette mort où se tiennent les vivants« . (chapiteau de l’abbaye)
19h19 : Serge Pey, La Marche du poème (parc de l’abbaye)
21h30 : Thomas Bernhard, la lecture : art mathématique suprême, par Dieter Hornig et Mélanie Traversier. (parc de l’abbaye)

Passage de témoin

C’est un nouvel exercice imaginé pour cette année. Il s’agit, pour un des acteurs du Banquet de venir, entre 12h30 et 13 heures, un livre en main, tenir récit et laisser au suivant une phrase, un paragraphe, une image qui l’obligera à rebondir et à poursuivre, le lendemain. Corps vivant exquis.
Hier, c’était Marielle Macé qui, laissa, comme drapeau rouge, cette phrase tirée du recueil La Cité de paroles, de Stéphane Bouquet (José Corti, 2018) :
« Il y a une cache de douceur au fond du langage – c’est notre seule raison de parler. (…) Le poète est soucieux de suivre la bête douceur jusqu’à son territoire sous les signes, jusqu’à son nid dans les visages, jusqu’à l’endroit secret où la bête sait qu’il faut qu’elle se cache et où elle attend pourtant d’être débusquée. Où toute sa patience est attente, et elle respire exprès trop fort de crainte de passer inaperçue. On ne parle que sur la piste de la douceur : on parle et parle pour trouver, à la fin, le coeur pulpeux du langage (…) : ce lieu amène, cette volubilité de paroles qui fait que les bouches s’ouvrent pour tout et rien dans un désordre fraternel. Les façons de le dire sont légion. Il y a un bourdonnement candide d’insectes au fond du langage, et cela est une sorte de solution.« 

Mesures sanitaires

La nouvelle loi a rendu la passe sanitaire (vaccination complète, test PCR négatif ou certificat de rétablissement) obligatoire pour les manifestations comme le Banquet. Ce certificat vous sera donc demandé à l’entrée du site, où le port du masque est obligatoire.

Si vous n’êtes pas vacciné, la pharmacie de l’Orbieu réalise gratuitement des tests (sauf dimanche ; se munir de sa carte vitale) et délivre ensuite un document qui vous permettra d’assister au Banquet.

« Tout ce qui augmente la liberté augmente la responsabilité. Être libre, rien n’est plus grave ; la liberté est pesante, et toutes les chaînes qu’elle ôte au corps, elle les ajoute à la conscience. » Victor Hugo
Léonora Miano et les îles éparses, dimanche après-midi…

Exposition Des Jardins

Lauréats de la Résidence partagée de la Maison du Banquet et des générations en 2020, qui se tint autour du thème Des Jardins, Estelle Chauvard (designer), Adrien Genoudet (historien, écrivain et cinéaste) et Louise Piélat (paysagiste) présente jusqu’à l’automne dans l’abbaye une exposition sur les jardins de Lagrasse ou d’ailleurs, imaginaires ou tangibles.
Pour les retrouver dans un reportage vidéo réalisé pendant la résidence, Cliquez ici.

Sur le chemin des arts de lire

Dès le début de l’année prochaine, à l’enseigne des Arts de Lire, un Centre Culturel de Rencontres va prendre le relais, dans l’abbaye publique, de la Maison du Banquet et des générations. Pour commencer à défricher quelques uns des chemins possibles qui s’ouvrent devant nous, Le Marque-Page a organisé, au printemps dernier, un colloque avec les meilleurs spécialistes. Retrouvez leurs contributions sur les quatre thèmes abordés, « Histoire et lecture du bâtiment de l’abbaye bénédictine de lagrasse ; Lecture des images du Moyen-Âge ; L’étude hébraïque à Narbonne au Moyen-Âge ; Les nouvelles scènes de la lecture.   Cliquez ici.