Vendredi 13 août 2021

L’Éphémère

C’est Mathieu Potte-Bonneville qui a lancé l’affaire. Dans son « Passage de témoin » de dimanche, il faisait remarquer à quel point la manière dont depuis quelques années déjà, on nommait la librairie du Banquet – « librairie éphémère » – sous prétexte qu’elle n’existait qu’une semaine par an, relevait de l’oxymore aux champs. Car qu’y-a-t-il de moins éphémère qu’une librairie ou une bibliothèque, ces coffres ouverts protégeant tous les savoirs, toutes les aventures. Ces pages qui volent, ces lignes tracées dans des encres qui s’oublient, comment font-elles pour ne jamais disparaitre ? Pour rester dans la mémoire de l’un, dans le cœur de l’autre ?
Dans le Robert Historique de la langue française, on nous signale que le mot éphémère vient du grec ephêmeros, un adjectif qui signifie « soumis au destin de chaque jour ». Plus une histoire de bestiole qui brûle sa vie en un tour de cadran.
Mais ce sont bien nos libraires qui sont allés, hier, aux entrailles de la question. Nicolas et Samuel, de cette librairie qui justement « ne fait que passer », ont expliqué (revoir ici leur intervention) ce qu’ils ont fini par comprendre. Qu’au delà de ces disparitions soudaines, chaque année au soir du dernier jour du Banquet, quand en trois heures tout se transforme et que les livres se caltent en douce à petits coups de cartons (« Inutile de revenir demain. Allez, calte ! » Queneau, Pierrot mon ami, 1942)  et qu’on reste interdit, le lendemain matin, devant cette immense pièce vide, avec dans un coin un monticule de cartonnages déchirées, morceaux de cellulose au ph neutre, de papiers secs et de plastiques froissés (Il y avait une librairie, ici, hier ?) quelque chose restait, quand tout avait disparu.
On pensait, donc, que tout repartait avec le grand camion loué au Super U de Trèbes ? Il semblerait que non. Que les choses restent, invisibles. Des idées. Des histoires. Qu’elles viennent des livres exposés, ou des échanges autour des conférences et des débats. Ces choses forment même un humus rare qui se loge dans l’air et attend patiemment l’été suivant, pour reprendre vie et bousculer les idées, les nouvelles histoires de saison qui arrivent, innocentes,  au seuil du prochain Banquet…

Jean-Claude Milner, droits et pouvoirs, et l’inverse

Les conférences de Jean-Claude Milner sont toujours des plus attendues. Et le public, très impressionnant en nombre et en qualité d’écoute, débordait très largement, sur trois côtés, du grand chapiteau.
Dans sa communication, Jean-Claude Milner interrogea la notion de souveraineté du peuple à travers de multiples exemples, des gilets jaunes à l’assaut du Capitole américain, de la pandémie au mouvement anti-passe. La revendication, nouvelle, de l’exercice de cette souveraineté par des groupes, et par chaque individu dans la solitude royale de sa page Facebook pose une nouvelle donne inquiétante. Pas de révolte, pas de révolution, quelque chose à la fois de plus simple et de plus étrange…

Cette conférence de Jean-Claude Milner sera disponible ici en intégralité, dès dimanche.

Une double-voix de référence

Pour le coup, c’en était une. L’exercice de la double-voix, que nous avons inauguré il y a trois ans, est tout sauf évident. Deux penseurs, deux écrivains, deux poètes, se parlent et s’interrogent l’un l’autre. Difficile parfois d’éviter les discours parallèles, les prudences convenues. Hier après-midi, dans la canicule, Mathieu Potte-Bonneville et Peter Szendy nous ont donné ce fameux match de référence qu’on attend encore, cette année, du côté du PSG. Le match où tout est parfait, devant, derrière, et au milieu. Où les tactiques sont en place, et où le jeu est celui dont on a toujours rêvé.
Peter Szendy et Mathieu Potte-Bonneville en mano a mano parfait, deux intelligences au travail, qui s’écoutent d’abord, se soutiennent, rebondissent et se poussent vers le haut.
Cette rencontre, comme toutes celles de ce Banquet 2011, sera disponible en ligne en intégralité dès ce dimanche 15 août.

Une Criée

Chaque après-midi, juste avant la conférence de 18 heures, quelqu’un monte sur une petite estrade, juste au milieu de la librairie du Banquet, et « crie » un livre de son choix. C’est à dire qu’il le défend avec toute sa conviction pour donner envie au public présent de l’acheter. Hier, c’était Lucie Combret, l’ancienne secrétaire générale de la Maison du Banquet, de passage parmi nous. Elle défendit, avec brio, La Petite Lumière, d’Antonio Moresco. Jugez vous-mêmes…

Cinéma aux étoiles

Pour clore ce Banquet 2021, nous projetterons ce soir, à 21 heures 30 sur les murs de l’abbaye, le film d’Aurel, Josep, en présence du réalisateur et de Serge Lalou, le producteur de ce film exceptionnel. Une oeuvre d’animation, unique, qui évoque l’histoire de la Retirada, épisode ultime et désastreux de la guerre civile espagnole, qui vit des centaines de milliers d’hommes, femmes, enfants et vieillards, se réfugier en France par les chemins de la côte ou de la montagne. L’accueil par les autorités françaises fut brutal et inique.
« En février 1939, suite à la guerre civile espagnole, les Républicains font tout pour fuir la dictature de Franco et trouver refuge en France. Cependant, le gouvernement français a installé des camps qui limitent l’accès des réfugiés à l’eau et à la nourriture. Dans un de ces camps, deux hommes se lient d’une grande amitié. L’un est gendarme, l’autre est Josep Bartolí, un illustrateur antifranquiste.« 

Quelques destins

Des parcours de vie d’Audois, perdus dans les replis de l’histoire.

Aujourd’hui, nous vous proposons quelques fragments furtifs, des bouts de vie entraperçues dans les pages de la presse locale. Voilà quelques figures, signalées par Le Courrier de l’Aude au cours de l’année 1892…
Lire la suite…

Idriss, quelle drôle d’année !

Le moins qu’on puisse dire, c’est que cette année qui s’achève n’a ressemblé à aucune autre.
Pour en retrouver les sursauts, nous avons parcouru avec lui les archives d’Idriss Bigou-Gilles, jeune photographe de presse indépendant qui vit dans les Corbières.
En sept clichés, une drôle d’année, dont il faudra quand même se souvenir.
Photo n°7, Sacré-profane, sortie de confinement (mercredi 3 juin 2020, Belvédère de Sète)

Pour l’entretien avec Idriss, cliquez sur la photo

Parcours de lecture

Parmi les grandes lectures qui ont marqué, depuis vingt-cinq ans, les nuits profondes ou les aimables après-midi du Banquet, il y eut ce parcours.
Le 4 août 2008, dans le cadre du banquet « Le Monde existe-t-il ? », Jacques Bonnaffé lisait Vasiliĭ Golovanov et son « Éloge des voyages insensés ».
Vasiliĭ Iaroslavovitch Golovanov est mort le 13 avril 2021.

numéro 126

Le programme du jour

Laure Murat
10h : ouverture des librairies et du bistrot
10h30 : Grand Petit Déjeuner, avec Jean-Claude Milner (jardins de l’abbaye)
12h30 : Passage de témoin. (jardins de l’abbaye)
16h : Laure Murat, « De quoi hier sera-t-il fait ? Réflexion sur la cancel culture ». (chapiteau de l’abbaye)
17h45 : La Criée (librairie du Banquet)

18 h : Georges Didi-Huberman, « Faire le pas ». (chapiteau de l’abbaye)
21h30 : cinéma aux étoiles : Josep, d’Aurel (parc de l’abbaye)

Passage de témoin

C’est un nouvel exercice imaginé pour cette année. Il s’agit, pour un des acteurs du Banquet de venir, entre 12h30 et 13 heures, un livre en main, tenir récit et laisser au suivant une phrase, un paragraphe, une image qui l’obligera à rebondir et à poursuivre, le lendemain. Corps vivant exquis.
Aujourd’hui, c’est l’historien Patrick Boucheron qui clôt ce cycle en partant de cette citation, à lui léguée hier :
« On écrit aussi pour n’avoir plus de visage, pour s’enfouir soi-même sous sa propre écriture. On écrit pour que la vie qu’on a autour, à côté, en dehors, loin de la feuille de papier, cette vie qui n’est pas drôle, mais ennuyeuse et pleine de soucis, qui est exposée aux autres, se résorbe dans ce petit rectangle de papier qu’on a sous les yeux et dont on est maître. »
Autour du chapiteau, la tension extrême d’un public concentré.
Et dans la librairie du Banquet, pendant l’exercice de la Criée.

Exposition Des Jardins

Lauréats de la Résidence partagée de la Maison du Banquet et des générations en 2020, qui se tint autour du thème Des Jardins, Estelle Chauvard (designer), Adrien Genoudet (historien, écrivain et cinéaste) et Louise Piélat (paysagiste) présente jusqu’à l’automne dans l’abbaye une exposition sur les jardins de Lagrasse ou d’ailleurs, imaginaires ou tangibles.
Pour les retrouver dans un reportage vidéo réalisé pendant la résidence, Cliquez ici.

Sur le chemin des arts de lire

Dès le début de l’année prochaine, à l’enseigne des Arts de Lire, un Centre Culturel de Rencontres va prendre le relais, dans l’abbaye publique, de la Maison du Banquet et des générations. Pour commencer à défricher quelques uns des chemins possibles qui s’ouvrent devant nous, Le Marque-Page a organisé, au printemps dernier, un colloque avec les meilleurs spécialistes. Retrouvez leurs contributions sur les quatre thèmes abordés, « Histoire et lecture du bâtiment de l’abbaye bénédictine de lagrasse ; Lecture des images du Moyen-Âge ; L’étude hébraïque à Narbonne au Moyen-Âge ; Les nouvelles scènes de la lecture.   Cliquez ici.

Mesures sanitaires

La nouvelle loi a rendu la passe sanitaire (vaccination complète, test PCR négatif ou certificat de rétablissement) obligatoire pour les manifestations comme le Banquet. Ce certificat vous sera donc demandé à l’entrée du site, où le port du masque est obligatoire.

Si vous n’êtes pas vacciné, la pharmacie de l’Orbieu réalise gratuitement des tests (sauf dimanche ; se munir de sa carte vitale) et délivre ensuite un document qui vous permettra d’assister au Banquet.

« Tout ce qui augmente la liberté augmente la responsabilité. Être libre, rien n’est plus grave ; la liberté est pesante, et toutes les chaînes qu’elle ôte au corps, elle les ajoute à la conscience. » Victor Hugo