Ces livres sont nos témoins

Véronique Moutot-Narcisse

 

 

 

Véronique Moutot-Narcisse est enseignante. Elle vient au Banquet du livre d’été depuis 2008.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

11 août 2021. Sous l’arbre aux palabres Christophe Pradeau « reprend le témoin » tendu par Dominique Larroque et arpente les 365 appartements sous lesquels un texte de Jules Romains creuse ses galeries : irrésistiblement, me voilà transportée par ces couloirs et escaliers dérobés, quelques années auparavant, dans ce même lieu où j’assistais à mon premier Banquet du livre. Alors que, avec Sandrine, Christophe, Tiphaine, François et Gilles, je pénètre dans le cloître un soir d’août 2008, le ciel des Corbières s’ouvre en grand : la voix d’Eugenio De Signoribus, accompagné par Martin Rueff, monte vers les étoiles. Un an plus tard, me tenant difficilement sur ma chaise malmenée par les puissantes racines de l’arbre du petite cloître, je vis pleinement « le tranchant de la défaite », dont, flanqué de Machiavel, Patrick Boucheron nous entretient.

« Venez ! », lance Christophe Pradeau, ou plutôt le personnage du « Conte des 365 appartements », et me voici face à Jean-Christophe Bailly, qui occupe soudain tout l’espace de cette journée d’août 2014. Je n’ose lui dire, en sortant de sa conférence, que sa voix s’est si étroitement agrégée à la mienne depuis Le Dépaysement que mes étudiants le citent plus que Victor Hugo.

Les portes ne cessent plus de s’ouvrir. Pendant que Christophe parle, j’ai allumé mon téléphone afin que, à l’autre bout d’un corridor numérique, Marielle Macé, repartie la veille, puisse écouter ce passage de témoin. Marielle, rencontrée sous l’influence des astres en 2016, devenue une amie par la grâce du Banquet. Marielle qui, quand nous participons à la création d’une librairie coopérative à Montpellier, vient dès la première année d’ouverture construire des cabanes avec les enfants du quartier et jouer le rôle de « libraire d’un jour ».

Ces voix amies, je les offre sans relâche à ceux que j’aime ; sous le papier rouge dans lequel je les enveloppe, les phrases de Patrick Boucheron, Eugenio De Signoribus, Martin Rueff, Jean-Christophe Bailly, Marielle Macé et Christophe Pradeau composent plus que des livres : des lieux où se tenir ensemble.